1 PRÉSENTATION
Afrique, une des cinq parties du monde, située de part et d’autre de l’équateur, délimitée à l’est par l’océan Indien et la mer Rouge, au nord par la Méditerranée, à l’ouest par l’océan Atlantique, séparée de l’Asie par le canal de Suez et de l’Europe par le détroit de Gibraltar.
Les îles les plus peuplées et les plus grandes, Madagascar (la « grande île »), Zanzibar, Pemba, Maurice, La Réunion, les Seychelles et les Comores, se trouvent dans l’océan Indien. São Tomé, Príncipe, Annobon, Bioko et les îles Bissagos font partie du golfe de Guinée ; les îles du Cap-Vert et les îles Canaries constituent des archipels isolés au large des côtes ouest-africaines, sans toutefois atteindre l’éloignement de Sainte-Hélène et de l’île de l’Ascension, perdues dans l’Atlantique.
2 MILIEU NATUREL
Avec une superficie de 30 330 000 km2, dont 622 000 km2 pour les îles, l’Afrique est le deuxième continent par la taille (22 p. 100 de la surface terrestre).
Ce continent à l’aspect massif s’étend sur 8 050 km de sa pointe septentrionale, le cap Blanc, en Tunisie, à son extrémité australe, le cap des Aiguilles, en Afrique du Sud. Sa largeur maximale, du cap Vert, au Sénégal, à l’ouest, au Ras Hafoun, en Somalie, à l’est, est d’environ 7 560 km. Il culmine au mont Kilimandjaro (5 895 m au mont Kibo), au sommet recouvert de neiges éternelles, en Tanzanie. La région la plus basse est la dépression salée du lac Assal (153 m en dessous du niveau de la mer), sur le territoire de Djibouti.
La longueur totale des côtes (30 490 km) est inférieure, comparée à la superficie, à celle des autres continents. La côte africaine est inhospitalière sur le versant atlantique en raison d’une forte barre et de la rareté des échancrures, sauf à l’embouchure des fleuves et dans le golfe de Guinée, où un cordon littoral isole souvent de calmes lagunes au bord desquelles vit une population nombreuse. La côte orientale, plus accueillante, est balayée par les vents de mousson qui favorisent la navigation dans l’océan Indien.
À l’exception de la côte septentrionale et des chaînes de l’Atlas dans le nord-ouest, l’Afrique est caractérisée par de grandes cuvettes où coulent majestueusement de grands fleuves – Nil, Niger, Congo, Zambèze – qui accèdent à la mer par des chutes et des rapides spectaculaires.
2.1 Relief
2.1.1 Orogenèse
Un vaste bouclier continental de roches précambriennes s’étend du sud de l’Atlas au cap de Bonne-Espérance. À l’est, il englobe la péninsule arabe et Madagascar qui se détachèrent de l’Afrique à l’ère tertiaire (voir tectonique des plaques). On a découvert dans ces roches des fossiles de micro-organismes datés de 3,2 milliards d’années.
Les forces tectoniques qui séparèrent l’Afrique de l’Amérique du Sud au moment de la dislocation du grand continent du Gondwana, il y a plus de 150 millions d’années (voir jurassique), poursuivirent leur action à une époque plus récente, créant une suite de fossés tectoniques (la Rift Valley) en Afrique orientale à l’ère tertiaire, et provoquant la formation des volcans des monts Kenya, Kilimandjaro, Ruwenzori et Virunga.
2.1.2 Relief actuel
D’une manière générale, l’altitude du continent africain augmente du nord-ouest au sud-est. Les bandes côtières basses, à l’exception de la côte méditerranéenne et de la côte de la Guinée, sont généralement étroites, avant de s’élever brusquement.
Au nord-ouest, les chaînes de l’Atlas, successions de pics escarpés qui culminent à 4 165 m d’altitude et entre lesquels s’intercalent de hauts plateaux, s’étendent du Maroc jusqu’en Tunisie sur 2 400 km de long.
Le Sahara, le plus grand désert du monde, s’étend de l’Atlantique à la mer Rouge de part et d’autre du tropique du Cancer. Cette vaste dépression est parsemée de reliefs (Adrar mauritanien, Aïr, Hoggar, Tibesti). Certaines parties du Sahara, comme le Tanezrouft et le désert de Libye, sont extrêmement arides. À l’est, le désert est traversé par le Nil ; il prend fin, avec le désert Arabique et le désert de Nubie, devant la mer Rouge.
Au sud du désert, cette dépression se poursuit par une région de transition, le Sahel (dont le nom signifie « rivage »), fait de plaines et de faibles ondulations. Au sud-ouest, le Fouta-Djalon, les massifs de l’Atakora, dans le nord du Bénin, et de l’Adamaoua, dans le sud-ouest du Cameroun sont les rares points émergents du relief. Au centre de l’Afrique, le bassin du Congo est une dépression majeure.
Les plateaux orientaux, autour de l’équateur, sont les plus élevés du continent. Ils occupent le versant oriental de l’Afrique et s’étendent de la mer Rouge au Zambèze. Leur altitude moyenne dépasse 1 500 m. Ils s’élèvent progressivement sur le plateau éthiopien pour dépasser les 3 000 m ; le Ras Dachan (4 620 m), dans le nord de l’Éthiopie, en est le point culminant. Plus au sud se trouvent plusieurs volcans, dont le Kilimandjaro, qui avec ses 5 895 m d’altitude est le point culminant de l’Afrique, le mont Kenya (5 199 m) et le mont Elgon. Une caractéristique topographique particulière des montagnes orientales est le vaste système de fossés tectoniques (Rift Valley) traversant la région dans le sens nord-sud. À l’ouest, le Ruwenzori atteint une altitude maximale de 5 119 m au pic Margherita.
Le sud du continent est constitué d’un vaste plateau, coupé par les dépressions du delta de l’Okavango et du désert du Kalahari. Le rebord méridional du plateau austral longe la côte sud-est sur quelque 1 100 km et culmine à 3 650 m dans le Drakensberg, en Afrique du Sud. Le Karroo est un plateau aride d’environ 260 000 km2, également en Afrique du Sud. Le désert du Namib s’étend sur près de 2 000 km le long de la côte de l’océan Atlantique.
L’île de Madagascar est constituée d’un plateau central ravagé par l’érosion et bordé à l’est par une plaine côtière humide.
La plupart des sols africains présentent un drainage irrégulier et une nappe phréatique peu visible, sauf au Sahara où de grandes nappes fossiles et des rivières souterraines ont été repérées (Algérie, Libye). Les sols déboisés sont souvent incultivables en raison de la violence des pluies et du lessivage des minéraux. Les sols désertiques, pauvres en composants organiques, couvrent une vaste étendue. Certains sols de savane, durcis, présentent des cuirasses (latérite).
2.2 Hydrographie
Il existe six grands bassins hydrographiques en Afrique. À l’exception du bassin du lac Tchad, dont les eaux s’évaporent sous l’effet de la chaleur, ils aboutissent tous dans la mer et sont caractérisés par des chutes et des rapides qui empêchent la navigation.
Le Nil, le plus long fleuve du monde avec ses 6 650 km, arrose le nord-est de l’Afrique. Formé du Bahr el-Azrak, qui prend sa source dans le lac Tana en Éthiopie, et du Bahr el-Abiad, qui a la sienne au sud du Burundi et se forme au sortir du lac Victoria, le Nil coule vers le nord, traverse la Sahara et se jette dans la Méditerranée par un large delta.
Le Congo, avec ses 4 400 km, baigne une grande partie de l’Afrique centrale. Il naît en Zambie et coule vers le nord sous le nom de Lualaba. Il oblique vers l’ouest puis vers le sud-ouest pour se jeter dans l’océan Atlantique.
Le troisième grand fleuve africain, le Niger, en Afrique occidentale, est long d’environ 4 200 km ; son cours supérieur n’est navigable que pendant la saison des pluies. Le Niger, qui prend sa source sur le plateau du Fouta-Djalon, coule vers le nord et l’est en formant un vaste delta intérieur où les eaux de la crue s’étalent avant de se diriger vers le sud, puis de se jeter dans le golfe de Guinée par un delta aux bras multiples.
Le Zambèze, long d’environ 3 540 km, naît en Zambie, dans le sud-est de l’Afrique, et coule vers le sud, l’est et le sud-est avant de se jeter dans l’océan Indien. Le Zambèze présente de nombreuses chutes, dont les plus remarquables sont les chutes Victoria. Le fleuve Orange (2 100 km) et son affluent le Vaal baignent le sud de l’Afrique. L’Orange naît dans le massif du Drakensberg et se déverse, à l’ouest, dans l’Atlantique après avoir creusé des gorges spectaculaires.
Le lac Tchad, un lac d’eau douce d’une profondeur moyenne de 1,2 m environ, est le réceptacle des oueds et cours d’eau environnants. C’est le plus grand bassin fermé du continent. Sa profondeur et sa superficie varient considérablement selon les cycles pluviaux. Il existe aussi d’autres bassins fermés de moindre ampleur, en Afrique australe (delta de l’Okavango), et en Afrique orientale (lacs Natron, Turkana, vallée de l’Awash avec le lac Abbé).
La grande faille orientale a donné naissance à un grand nombre de lacs, avec, du nord au sud, les lacs Mobutu, George, Édouard, Kivu, Tanganyika et Malawi. Le lac Victoria, plus grand lac d’Afrique et troisième du monde, occupe une dépression peu profonde entre les deux branches du rift.
L’approvisionnement en eau est un problème majeur en Afrique. De vastes étendues souffrent de l’insuffisance ou de l’irrégularité des pluies et les populations doivent stocker l’eau en prévision du retard ou de l’insuffisance des précipitations. D’autres régions ont des réserves surabondantes. Il existe de grands marais et certaines zones sont périodiquement inondées (sud du Soudan, delta intérieur du Niger). Au cours des dernières années, de nombreux barrages et réservoirs ont été construits pour canaliser l’eau destinée à l’irrigation ou pour la production hydroélectrique (barrages d’Assouan sur le Nil, d’Akosombo sur la Volta, de Manantali sur le Niger, d’Inga sur le Congo, de Kariba et de Cabora Bassa sur le Zambèze). Grâce à ses nombreux cours d’eau, l’Afrique possède environ 40 p. 100 du potentiel hydroélectrique mondial.
2.3 Climat
Une grande partie du continent est soumise à l’influence du climat tropical. En Afrique orientale, des montagnes arrêtent la mousson de l’océan Indien.
On distingue plusieurs grandes zones climatiques. La partie centrale du continent et la côte orientale de Madagascar ont un climat caractéristique de la forêt pluviale tropicale. La température moyenne est d’environ 26,7 °C, avec des précipitations annuelles proches de 1 800 mm. Le climat de la côte de la Guinée ressemble au climat équatorial, mais les pluies se concentrent en une seule saison ; il n’y a cependant pas de mois sans pluie.
Au nord et au sud, le climat de la forêt pluviale laisse la place au climat tropical, caractérisé par une saison humide pendant les mois d’été et une saison sèche pendant les mois d’hiver, qui s’allonge à mesure que l’on approche des tropiques. Les précipitations annuelles totales varient de 1 500 mm à 550 mm. De part et d’autre de l’équateur, l’humidité décroît lorsque la latitude augmente, et l’on passe de la forêt dense à la forêt à feuilles caduques puis à la forêt claire et enfin à la savane. Le Sahel est une zone climatique intermédiaire entre la savane et le désert où les précipitations (400 à 600 mm) permettent encore la culture du mil sans irrigation, donc l’existence d’une agriculture de subsistance élémentaire.
De très vastes étendues ont un climat aride, ou désertique. Le Sahara, dans le nord, l’Abyssinie, dans l’est, et le Kalahari et le désert du Namib, dans le sud-ouest, reçoivent moins de 250 mm de pluies par an. Au Sahara, les variations de température entre le jour et la nuit, et entre les saisons sont importantes. Pendant la saison froide, la température nocturne tombe souvent en dessous de 0 °C.
Les zones de climat et de végétation méditerranéens se trouvent dans l’extrême nord-ouest et l’extrême sud-ouest de l’Afrique. Ces régions sont caractérisées par des hivers doux et humides, et des étés chauds et secs. Sur les plateaux d’Afrique orientale, en particulier au Kenya et en Ouganda, les précipitations sont bien réparties tout au long de l’année et les températures sont égales. Le climat du haut plateau de l’Afrique du Sud est tempéré dans la région du Cap.
2.4 Végétation et faune
2.4.1 Végétation
La végétation reflète les zones climatiques. La région de la forêt pluviale tropicale, où les précipitations annuelles moyennes dépassent 1 300 mm, est couverte d’une végétation dense de fougères et de mousses, dominée par de grands arbres à feuilles persistantes et de nombreuses espèces de bois dur tropical. Au sud de l’équateur, la forêt primaire occupe encore des zones non négligeables, notamment dans l’est de la République démocratique du Congo, sur les pentes du Ruwenzori et des monts Virunga, favorisée par des précipitations importantes (4 000 à 6 000 mm et plus, avec une humidité de 90 p. 100). Il existe une zone de forêts de montagnes, avec des précipitations annuelles moyennes moins importantes que celles de la forêt pluviale tropicale, dans les hauts plateaux du Cameroun, en Angola, en Afrique orientale et dans quelques régions de l’Éthiopie, où une étendue couverte de broussailles fait place à des arbres à bois dur et à des conifères primitifs.
Une savane boisée, avec des précipitations annuelles de 900 à 1 400 mm, couvre de vastes étendues de végétation résistante au feu : herbes, légumineuses et broussailles mélangées à des forêts de feuillus. La savane arbustive, avec des précipitations annuelles d’environ 500 à 900 mm, est couverte de hautes herbes, d’arbustes, de petits bosquets de feuillus isolés d’où émergent parfois de grands arbres, vestiges d’une ancienne grande forêt aujourd’hui disparue. La disparition de ces petites forêts, dont il ne reste souvent que des arbres et des arbustes clairsemés, annonce la transition avec la savane herbeuse, une zone particulièrement sensible à la désertification, introduisant insensiblement un paysage sahélien.
Dans le Sahel, l’homme, ses cultures et ses bovins vivent à la limite des possibilités de la nature et pâtissent du moindre accident climatique. C’est la brousse, avec une végétation de steppe, et des précipitations annuelles d’environ 300 à 500 mm. L’herbe y est plus basse et les arbustes couverts d’épines. La zone subdésertique (130 à 300 mm), où poussent quelques arbustes épars, verdit après les pluies pendant une courte période. C’est l’antichambre de la zone désertique (moins de 130 mm) où la végétation, rare ou inexistante, ne peut nourrir que les chameaux et parfois quelques chèvres.
2.4.2 Faune
L’Afrique présente deux zones zoologiques distinctes : la zone nord et nord-ouest, comprenant le Sahara, et la zone éthiopienne, englobant toute l’Afrique subsaharienne. Au nord du Sahara, on trouve communément des moutons, des chèvres, des chevaux et des chameaux. Le mouton de Barbarie, le daim rouge d’Afrique sont originaires de la côte d’Afrique du Nord. Dans le Sahara, on trouve des fennecs, ainsi que des lièvres, des gazelles et des gerboises, un petit rongeur se déplaçant par bonds.
La zone éthiopienne abrite une grande variété d’animaux et d’oiseaux. Dans les régions boisées et herbeuses vivent de nombreuses espèces d’antilopes et de daims, des zèbres, des girafes, des buffles, des éléphants d’Afrique, des rhinocéros et différents singes. Le gorille, le plus grand singe du monde, est en voie de disparition. Végétarien, il habite les forêts de montagne de l’Afrique équatoriale (Rwanda, République démocratique du Congo). On trouve des lémuriens à Madagascar. Parmi les carnivores figurent le lion, le léopard, le guépard, l’hyène, le chacal et la mangouste.
La plupart des oiseaux appartiennent au Vieux Monde et certains sont migrateurs : ils quittent l’Europe l’hiver pour venir hiverner dans les deltas et les marais d’Afrique (Sénégal, Okavango, sud-Soudan). La pintade est un des oiseaux les plus chassés. Il existe un grand nombre d’oiseaux aquatiques, notamment les pélicans, les hérons goliath, les flamants, les cigognes et les aigrettes. L’ibis se trouve dans la région du Nil et l’autruche, qui a quasiment disparu du Sahel, vit dans l’est et le sud de l’Afrique.
En ce qui concerne les reptiles, on trouve en Afrique lézards, crocodiles et tortues. Il existe plusieurs serpents venimeux dans toute la zone éthiopienne, dont le redoutable mamba. Parmi les serpents étouffant leur proie figurent les pythons, principalement en Afrique occidentale où ils sont l’objet d’un culte ; le boa constricteur est originaire de Madagascar.
L’eau douce abonde en poissons. On recense plus de 2 000 espèces. Le continent présente une variété d’insectes nocifs, notamment les moustiques, les fourmis migratrices, les termites, les criquets migrateurs et les mouches tsé-tsé. Ces dernières transmettent la maladie du sommeil aux hommes et aux animaux, interdisant par exemple l’élevage des bovins en zones forestières. La mouche tsé-tsé a été l’un des obstacles majeurs à l’extension en zone forestière des grands empires de la savane fondés sur la cavalerie, et à son islamisation.
2.5 Ressources minérales
L’Afrique est très riche en ressources minérales et possède la plupart des minéraux précieux, mais leur répartition géographique est irrégulière. Les combustibles fossiles abondent (charbon, pétrole, gaz naturel). L’Afrique possède de grands gisements d’or, de diamants, de cuivre, de bauxite, de manganèse, de nickel, de platine, de cobalt, d’uranium, de germanium, de lithium, de titane et de phosphates. Les autres ressources minérales importantes sont le minerai de fer, le chrome, l’étain, le zinc, le plomb, le thorium, le zirconium, le vanadium, l’antimoine et le béryllium. On trouve également de l’argile, du mica, du soufre, du sel, du natron, du graphite, du calcaire, du gypse et du phosphate. L’exploitation des salines naturelles dans les dépressions salées du Sahara a été à l’origine d’importantes routes commerciales.
3 POPULATION ET SOCIÉTÉ
La désertification du Sahara, commencée il y a dix millénaires, est à l’origine des grands mouvements de populations qui ont amené les hommes chassés par la sécheresse à s’établir en marge du désert (vallées du Nil, du Niger) ou à s’enfoncer dans les forêts équatoriales du Sud pour y développer des civilisations originales. Par la suite, le Sahara, devenu hostile, a fait office de barrière entre les peuples de l’Afrique subsaharienne, dépourvus de chevaux ou de chameaux, et ceux d’Afrique du Nord qui, une fois en possession de ces montures (vers la fin du Ier millénaire avant notre ère), ont acquis une supériorité et développé de grandes voies de communication à travers le désert.
3.1 Démographie
Dans la partie septentrionale du continent, y compris au Sahara, les Berbères et les Arabes sont devenus majoritaires. Au sud du Sahara, les Noirs sont les plus nombreux ; ils constituent plus de 70 p. 100 de la population du continent. Quelques groupes de Khoisans, les Bochimans et les Hottentots, subsistent dans le sud de l’Afrique. Les Pygmées habitent le bassin du Congo. On recense quelque 5 millions d’habitants d’origine européenne, principalement dans le sud de l’Afrique, et de nombreux expatriés temporaires. Une population indienne d’environ 1 million de personnes vit du commerce dans les villes d’Afrique orientale et en Afrique du Sud.
Bien que l’Afrique constitue un cinquième de la totalité de la surface terrestre, elle ne représente que 12,6 p. 100 de la population mondiale. En 1995, on estimait la population totale du continent à 710 millions d’habitants. La densité moyenne de 23 habitants au kilomètre carré représente à peine plus de la moitié de la moyenne mondiale. Cette statistique englobe de vastes étendues, comme les déserts du Sahara et du Kalahari, qui sont virtuellement inhabitées. Si l’on ne prend en compte que la population vivant sur les terres arables ou productives, la densité moyenne atteint 139 habitants au kilomètre carré. Les régions les plus densément peuplées du continent se situent le long des côtes septentrionale et occidentale, dans les bassins du Nil, du Niger, du Congo et du Sénégal et dans la région des Grands Lacs. Le Nigeria, avec ses 90 millions d’habitants, est le pays le plus peuplé d’Afrique, mais le Rwanda et le Burundi, qui comptent parmi les plus petits pays du continent, ont une densité supérieure à 250 habitants au kilomètre carré en zone de collines, une réalité qui est à l’origine des problèmes sociaux, économiques et politiques qui ensanglantent la région.
Le taux de natalité en Afrique atteint 46 p. 1 000. Les progrès de la médecine depuis la Seconde Guerre mondiale entraînèrent une forte chute du taux de mortalité (17 p. 1 000 en moyenne). La population croît annuellement d’environ 2,9 p. 100. Toutefois, ces statistiques varient largement d’un pays à l’autre et suivant les régions. La pyramide des âges est très large à la base, et dans la plupart des pays d’Afrique, près de la moitié de la population est âgée de 15 ans et moins.
À l’origine essentiellement rurale, la population africaine s’urbanise rapidement, notamment en Afrique du Nord. Les centres urbains attirent des foules d’émigrants des zones rurales qui s’installent comme résidents permanents ou comme travailleurs saisonniers. La croissance urbaine est particulièrement rapide depuis les années 1950. On estime que la moitié de la population africaine vivra dans des villes en l’an 2000. L’émigration saisonnière du Sahel (Mali, Burkina, Niger) s’effectue vers les ports du golfe de Guinée (Abidjan, Accra, Lagos). En Afrique centrale, les mines et les usines de Zambie, du Zimbabwe et de l’Afrique du Sud favorisent l’exode rural. Les habitants du nord de l’Afrique choisissent la France et, plus récemment, d’autres pays de l’Union européenne. Les guerres civiles qui ont éclaté dans plusieurs pays, ainsi que les sécheresses et les famines ont provoqué l’émigration massive de réfugiés (Rwanda, Liberia, Somalie).
3.2 Découpage administratif
Les pays d’Afrique sont les suivants : l’Afrique du Sud, l’Algérie, l’Angola, le Bénin, le Botswana, le Burkina, le Burundi, le Cameroun, le Cap-Vert, les Comores, la république du Congo, la République démocratique du Congo, la Côte d’Ivoire, Djibouti, l’Égypte, l’Érythrée, l’Éthiopie, le Gabon, la Gambie, le Ghana, la Guinée, la Guinée-Bissau, la Guinée équatoriale, le Kenya, le Lesotho, le Liberia, la Libye, Madagascar, le Malawi, le Mali, le Maroc, la Mauritanie, le Mozambique, la Namibie, le Niger, le Nigeria, l’Ouganda, la République centrafricaine, le Rwanda, São Tomé et Príncipe, le Sénégal, la Sierra Leone, la Somalie, le Soudan, le Swaziland, la Tanzanie, le Tchad, le Togo, la Tunisie, la Zambie et le Zimbabwe. Les îles de Madère, des Canaries et de Mayotte dépendent respectivement du Portugal, de l’Espagne et de la France. L’Espagne possède au Maroc deux enclaves, Melilla et Ceuta, ainsi que les îles Zaffarines.
Les plus grandes villes sont souvent des capitales d’État, et la plupart sont des villes portuaires issues de la colonisation, alors que l’intérieur de l’Afrique reste en grande partie rural. Au nord du Sahara, les villes de plus d’un million d’habitants sont Casablanca au Maroc, Alger en Algérie, Tunis en Tunisie, Tripoli en Libye, Le Caire qui, avec ses 13 millions d’habitants, est la plus grande ville d’Afrique et Alexandrie en Égypte. Au sud du Sahara, ce sont Dakar au Sénégal, Conakry en Guinée, Abidjan en Côte d’Ivoire, Accra au Ghana, Lagos, Ibadan et Kano au Nigeria, Douala au Cameroun, Khartoum au Soudan, Addis-Abeba en Éthiopie, Kampala en Ouganda, Nairobi au Kenya, Dar es-Salaam en Tanzanie, Kinshasa en République démocratique du Congo, Luanda en Angola, Lusaka en Zambie, Maputo au Mozambique, Johannesburg, Le Cap et Soweto en Afrique du Sud, Antananarivo à Madagascar.
3.3 Langues et religions
Plus de mille langues sont parlées en Afrique, dont plus de cinquante, par plus de 500 000 personnes. Hormis l’arabe, les langues d’Afrique qui comptent le plus de locuteurs sont le swahili en Afrique centrale et orientale, et le haoussa au Tchad, au Niger et au Nigeria. De nombreux Africains, en particulier ceux de l’Afrique subsaharienne, parlent plusieurs langues : la leur et celles de leurs voisins, ainsi que celles des anciennes administrations coloniales européennes dont ils se servent pour les échanges interafricains et internationaux.
Le christianisme fut introduit en Afrique du Nord au Ier siècle et s’étendit vers le Soudan et l’Éthiopie (IVe siècle). Il subsista en Éthiopie avec l’Église copte. La religion chrétienne se développa à nouveau depuis l’Afrique tropicale avec le début de l’expansion européenne au XVe siècle. Aujourd’hui, les groupes catholiques et protestants sont à peu près également répartis sur tout le continent, mais ces derniers font des progrès spectaculaires.
L’islam, la première religion de l’Afrique, fut introduite par les marchands maghrébins à partir de l’Afrique du Nord au VIIe siècle, et se propagea à la même époque le long de la côte de l’Afrique orientale dans le sillage du commerce musulman. L’école juridique malikite (sunnite) domine la plus grande partie de l’Afrique musulmane, à l’exception de l’Égypte, de l’Est et de la côte d’Afrique orientale. Les marabouts sont des guides religieux particulièrement respectés.
La principale caractéristique de la conscience religieuse traditionnelle africaine est l’absence de frontière nette entre le monde spirituel et le monde naturel, et donc entre l’esprit humain et l’environnement. Bien que les religions traditionnelles présentent une grande diversité, elles mettent toutes en avant un seul dieu ou une seule entité créatrice et plusieurs esprits subordonnés : des esprits de la nature habitant les arbres, l’eau, les animaux et autres éléments naturels et des esprits ancestraux, comme les fondateurs de la famille, de la lignée ou du clan.
Certains mouvements religieux baptistes, issus du christianisme, mêlent des rites chrétiens et des éléments religieux locaux. Dirigés par des prophètes, ces groupes syncrétiques se répandirent dans toute l’Afrique. Ils sont particulièrement concentrés et puissants dans le sud et le centre de l’Afrique (république du Congo, République démocratique du Congo).
En Éthiopie, les Falashas pratiquaient un judaïsme remontant à la destruction du Temple de Jérusalem (Ve siècle av. J.-C.). Entre 1984 et 1991, ils émigrèrent en Israël. Les Indiens d’Afrique orientale et des îles de l’océan Indien sont hindouistes ou ismaïliens.
3.4 Société
La famille élargie est l’unité de base de la plupart des sociétés africaines. Dans une grande partie du continent, elle est liée par des lignages, des clans et des castes dont le rôle dans la vie quotidienne, l’économie et la politique est très important. Les relations entre les communautés fonctionnent avant tout sur l’échange et la complémentarité, plusieurs communautés, clans et castes cohabitant souvent dans le même village. Leurs rapports respectifs sont réglés par des codes très stricts établis dans le passé en fonction d’anciennes nécessités économiques ou historiques.
Les ancêtres masculins ou féminins fondateurs du village, de la lignée ou du clan sont la référence de tous. Leur protection est demandée lors des fêtes traditionnelles des semailles et des moissons, et durant les initiations, rites de passage qui ont pour but d’insérer l’individu dans la société et de lui enseigner les règles de la vie en commun.
L’exode rural et la cohabitation avec d’autres communautés dans des villes devenues tentaculaires font éclater les règles traditionnelles, comme les interdits concernant le mariage. Ici, les « clivages ethniques » s’effacent devant les problèmes sociaux des métropoles modernes.
3.5 Arts et vie culturelle
Une grande partie de l’activité culturelle se concentre autour de la famille et du groupe communautaire. L’art, la musique et la littérature orale renforcent les modèles religieux et sociaux existants. La minorité occidentalisée, influencée par la culture européenne et le christianisme, avait commencé à rejeter la culture traditionnelle africaine, mais l’émergence du nationalisme africain a favorisé un véritable réveil culturel. Voir Afrique, art d’Afrique, littératures d’Afrique, musiques .
4 ÉCONOMIE
4.1 Généralités
Traditionnellement, les Africains pratiquent l’agriculture et l’élevage de subsistance. Il existe de grands marchés et le commerce a été à l’origine des civilisations africaines depuis le début de notre ère. L’artisanat est une activité essentielle et les artisans (tisserands, forgerons, sculpteurs) faisaient partie des principaux enjeux au cours des batailles. Les grands empires de la savane, les royaumes de la forêt et les cités-États sont nés de l’artisanat et du commerce à grande distance.
La colonisation européenne introduisit de nouveaux produits agricoles, et l’exploitation des minerais entraîna un développement de l’émigration régionale ; de nouvelles voies de communication furent construites (routes, chemins de fer), l’introduction de techniques modernes et de produits européens permit l’essor d’une économie d’échanges. L’artisanat local (tissages, outils en fer) fut concurrencé par les marchandises européennes plus valorisantes. Les industries de transformation se développèrent, ainsi que les ports et les centres administratifs. La coexistence d’une économie de subsistance et d’une économie moderne caractérise l’économie africaine, mais dans les périodes de récession, une économie « informelle » (échanges traditionnels non mesurables par les méthodes d’investigation habituels) permet à la population de subvenir à ses besoins.
Le développement économique représente également un problème majeur dans une économie mondiale elle-même en crise. Plusieurs États africains détiennent des ressources naturelles importantes, mais seule l’Afrique du Sud possède les moyens financiers pour se développer. Les entreprises privées étrangères considèrent souvent l’investissement dans ces régions sous-développées comme trop risqué, ce qui s’est vérifié dans de nombreux cas. Les seules autres possibilités de financement proviennent des institutions nationales et internationales de prêt. Voir développement, pays en voie de.
Le niveau de vie des nations africaines a considérablement chuté au cours des années 1990, suivant en cela le cours des matières premières. La récession à l’échelle mondiale du début des années 1980 a multiplié les difficultés provoquées par l’augmentation des prix du pétrole dans les années 1970. Le règlement de la dette extérieure et les économies imposées par la Banque mondiale ont attisé le mécontentement populaire. La famine et la sécheresse se sont abattues sur de nombreuses régions au cours des années 1980 et des millions de réfugiés, chassés par la sécheresse ou les conflits civils, se sont établis loin de leur pays d’origine. Le choléra et le paludisme restent récurrents en Afrique, alors que le sida ne cesse de se propager.
4.2 Agriculture, forêts et pêche
Malgré l’expansion du commerce et de l’industrie, la plupart des Africains restent des agriculteurs et des éleveurs. Dans le nord et le nord-ouest de l’Afrique, on cultive le blé, l’avoine, le maïs et l’orge, et on récolte les dattes dans les oasis, les olives et les agrumes sur la bordure méditerranéenne ; les cultures maraîchères sont variées et pratiquées un peu partout grâce à l’irrigation. Dans la savane, on pratique l’agriculture itinérante liée au degré d’épuisement du sol et à la pratique du brûlis. Il en est de même dans les zones forestières. Les céréales, comme le mil et le sorgho, sont les principales cultures de la savane ; le riz, les ignames, le manioc, le gombo, le plantain et les bananes sont les cultures alimentaires des régions plus humides. Partout, on élève des chèvres et des moutons. Au Sahara, les chameaux sont utilisés pour les transports traditionnels.
L’élevage des bovins est impossible dans les régions infestées de mouches tsé-tsé, c’est-à-dire dans la plupart des zones forestières. En Afrique occidentale, ce problème sanitaire est à l’origine du grand commerce régional nord-sud du bétail, élevé par les pasteurs peul et expédié sur pied vers le sud pour nourrir les grands centres de la côte. Les hauts plateaux d’Afrique orientale et australe restent cependant le domaine privilégié des éleveurs.
La culture commerciale, ou culture de rente, est commune à tout le continent et occupe près de la moitié des terres cultivées. Le café, le coton, le cacao, les arachides et l’huile de palme sont destinés à l’exportation. L’Afrique fournit plus de la moitié de la demande mondiale en café, cacao, arachide, sisal, clou de girofle.
Le bois n’a plus qu’une valeur limitée, sauf pour son utilisation locale comme combustible, mais le déboisement intensif, surtout dans la périphérie des villes, accentue le processus de désertification. Le Gabon est le principal fournisseur d’okoumé, un bois utilisé pour la fabrication du contreplaqué ; la Côte d’Ivoire, le Liberia, le Ghana et le Nigeria sont les principaux exportateurs de bois durs, mais l’exploitation souvent anarchique accentue la déforestation.
À l’intérieur des terres, aux côtés de la pêche, l’élevage de poissons se pratique depuis un demi-siècle. Ainsi, le Mali, où la pêche est pratiquée de façon intensive depuis toujours dans le delta intérieur du Niger, arrive au premier rang dans ce domaine en Afrique. Les côtes de l’Atlantique sont parmi les plus poissonneuses du monde, mais les pêcheurs locaux n’ont pas le matériel nécessaire pour pratiquer la pêche industrielle. Toutefois, les pays riverains perçoivent des pays développés d’importants droits de pêche.
4.3 Mines et industries
L’extraction minière représente le plus grand volume des revenus de l’exportation. Près de la moitié du revenu des minerais d’Afrique revient à l’Afrique du Sud ; une grande partie vient de l’exploitation des mines d’or et de diamants. Les autres principaux pays fournisseurs de minéraux sont la Libye (pétrole), le Nigeria (pétrole, gaz naturel, charbon, étain), l’Algérie (pétrole, gaz naturel, minerai de fer), la République démocratique du Congo et la Zambie (cuivre, cobalt, charbon, plomb, zinc). Le fer est présent sur tout le continent. On trouve également du pétrole le long de la côte occidentale de l’Afrique, du bassin du Gabon à l’Angola (Cabinda).
Un tiers de l’uranium mondial est fourni par l’Afrique, notamment par l’Afrique du Sud, le Niger, la République démocratique du Congo, la République centrafricaine et le Gabon. Environ 20 p. 100 des réserves de cuivre du monde se concentrent en Zambie, en République démocratique du Congo, en Afrique du Sud et au Zimbabwe. La République démocratique du Congo possède également environ 90 p. 100 des gisements de cobalt connus dans le monde et la Sierra Leone détient les plus grandes réserves de titane connues. L’Afrique fournit près des trois quarts de l’or mondial ; l’Afrique du Sud, suivie par le Zimbabwe, la République démocratique du Congo et le Ghana, en sont les principaux producteurs.
Les mines d’Afrique du Sud, de la République démocratique du Congo, de l’Angola, de la République centrafricaine et du Botswana fournissent virtuellement la totalité des gemmes et des diamants industriels.
La plus grande partie des richesses minières de l’Afrique est cependant exploitée par de grandes multinationales. Les pays africains ont tenté sans grand succès de devenir actionnaires dans l’exploitation de leurs propres richesses.
Le Nigeria, la Libye, l’Algérie et l’Angola sont parmi les premiers producteurs mondiaux de pétrole. Les exportations de gaz naturel se concentrent en Algérie. Le charbon est exploité au Zimbabwe et en Afrique du Sud ; leur production est destinée à l’utilisation locale. Les autres pays d’Afrique doivent importer leur énergie, en particulier le pétrole. L’augmentation du prix du pétrole dans les années 1970 a été préjudiciable à de nombreux pays, déséquilibrant la balance des paiements et augmentant la dette, ce qui a entravé le développement dans les années 1980 et 1990.
Bien que l’Afrique détienne près de 40 p. 100 du potentiel hydroélectrique mondial, seule une partie relativement limitée s’est développée en raison des coûts de construction, de l’inaccessibilité des sites et du transport de l’énergie. Cependant, depuis les années 1950, quelques-uns des plus grands barrages du monde ont été construits en Afrique, notamment à Assouan sur le Nil, à Akosombo sur la Volta, au Ghana, à Kariba et à Cabora Bassa sur le Zambèze.
Les industries de transformation sont fondées sur l’extraction minière et pétrolière (fonderie et raffinage). L’Afrique du Sud, premier producteur industriel du continent, a développé l’industrie lourde, la métallurgie et la fabrication de machines et de moyens de transport. Des centres industriels importants se sont également développés au Zimbabwe, en Égypte et en Algérie. Les industries liées aux minerais sont présentes en République démocratique du Congo et en Zambie ; le Kenya, le Nigeria et la Côte d’Ivoire se sont spécialisés dans le textile, l’industrie légère et les matériaux de construction. Dans le reste de l’Afrique, la production industrielle se limite à la fabrication et à l’assemblage de biens de consommation, comme les chaussures, les bicyclettes, les textiles, les denrées alimentaires et les boissons.
4.4 Échanges
Les moyens de communications datent presque tous de l’époque coloniale et n’ont guère été améliorés depuis (sauf le Transgabonais et le chemin de fer de Mauritanie construits pour exporter les minerais, et le réseau de l’Afrique du Sud). Les réseaux routiers de la plupart des pays sont constitués en grande partie de routes de terre, impraticables pendant la saison des pluies. Ils relient principalement l’intérieur du pays à la côte, mais sont dépourvus de routes transversales. Seule l’Afrique du Sud possède un réseau de communications digne de son époque.
L’économie des États africains dépend essentiellement des exportations et porte sur des matières premières dont la vente permettra d’acheter des biens industriels et de consommation. La plupart des anciennes colonies britanniques entretiennent toujours des relations commerciales lâches avec le Royaume-Uni et conservent leur réserve monétaire à Londres. Les anciennes colonies françaises ont des relations plus étroites avec la France. La plupart sont membres de la zone du franc CFA. En outre, la plupart des États africains ont des liens économiques avec l’Union européenne et bénéficient de réductions des tarifs douaniers (conventions de Lomé).
Le commerce interrégional porte essentiellement sur les échanges traditionnels (bétail, céréales) et échappe en partie au contrôle des États. Des systèmes économiques interafricains modernes ont cependant été mis en place. Les plus durables et les plus réussis sont la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest et la Communauté économique des États d’Afrique centrale. L’Organisation de l’unité africaine (OUA)œuvre également pour le développement du commerce et du développement économique interafricains.
5 HISTOIRE
5.1 Préhistoire et Antiquité
L’Afrique a vu naître les ancêtres de l’homme moderne. Ils sont apparus il y a quelque six millions d’années en Afrique orientale et leur découverte a été une grande aventure de la science. Ce sont des outils (de simples galets utilisés comme broyeurs) qui furent mis au jour en premier. Puis vinrent de nombreux fossiles, jusqu’à la découverte dans l’Afar, en Éthiopie, du squelette d’un australopithèque appartenant à l’espèce Australopithecus afarensis, dit Lucy, un hominidé de trois millions d’années. Il y a plus de 1,5 million d’années, la région de la Rift Valley vit ensuite apparaître Homo habilis et Homo erectus, des hominidés connaissant des outils de pierre plus élaborés. Homo sapiens, le premier homme véritable, apparut en Afrique il y a plus de deux cent mille ans, alors qu’il était déjà présent en Europe et en Asie. Voir Homme, évolution de l’.
Curieusement, l’homme préhistorique africain plus récent est moins connu, et ce n’est qu’à partir du Xe millénaire avant notre ère que l’on retrouve une continuité avec notre époque. Des fouilles récentes (1978) dans le massif de l’Aïr, au Niger, et des datations scrupuleuses ont permis de déterminer que, dès cette époque, les Africains avaient réussi à maîtriser la technique de la terre cuite de façon autonome. Ce lent processus allait aboutir à la découverte des arts du feu et de la métallurgie que nous connaissons à travers les œuvres en terre cuite de la civilisation Nok (Nigeria, Ve siècle av. J.-C.) puis les masques en laiton et en bronze d’Ifé et du Bénin (Xe-XIXe siècles).
La première grande civilisation d’Afrique se forma dans la vallée du Nil, vers 5000 av. J.-C. Chassés du Sahara par la désertification, les agriculteurs néolithiques s’établirent sur les bords du Nil, qui avait diminué de volume, et profitèrent des crues du fleuve comme source d’irrigation, ainsi que des nouveaux sols dégagés par le retrait des eaux. La nécessité de contrôler les crues permit la formation d’un État complexe et organisé, avec des systèmes politique et religieux élaborés (voir Égypte ; Égypte, art de l’ ; Égyptienne, mythologie ; Égypte ancienne, littérature de l’). La civilisation égyptienne rencontra les sociétés méditerranéennes tandis que l’assèchement général du climat la coupait de plus en plus du reste du continent auquel ne la reliait plus que la mince vallée du Nil. Dans la haute vallée du fleuve, en Nubie, se développèrent les royaumes de Napata puis de Méroé.
L’Afrique fut alors envahie pour la première fois de son histoire par des populations d’Arabie du Sud (le royaume de Saba) qui s’installèrent sur le plateau abyssin et fondèrent le royaume d’Aksoum, embryon de la royauté éthiopienne (IVe siècle av. J.-C.). Intégrés, puis alliés à la population noire locale, les souverains abyssins entretinrent des relations étroites avec le sud de l’Arabie et faillirent s’emparer de La Mecque, l’année même de la naissance du prophète Mahomet (570).
Du IIIe siècle av. J.-C. au début du Ier siècle apr. J.-C., Rome conquit Carthage, puis l’Égypte et l’ensemble de l’Afrique du Nord, qui devint le grenier à blé de l’Empire romain. Voir Afrique, province romaine d’. Toute la partie à l’ouest de la Libye actuelle resta aux mains de l’Empire romain d’Occident, la partie orientale, y compris l’Égypte, étant inféodée à l’Empire byzantin. À cette époque, la population des villes et des plaines côtières se convertit au christianisme. Au Ve siècle, les Vandales, une tribu germanique, conquirent une grande partie de l’Afrique du Nord et dominèrent la région pendant un siècle, puis furent vaincus par les armées byzantines. La région fut ensuite annexée à l’Empire d’Orient.
5.2 Royaumes africains
5.2.1 Afrique du Nord
Les armées musulmanes envahirent l’Afrique dix ans après la mort du prophète Mahomet en 632 et vinrent à bout de la résistance byzantine qui s’effondra.
Les Arabes soumirent ensuite les États berbères de l’ouest, atteignirent l’Atlantique puis s’établirent en Espagne (VIIIe siècle). Christianisées superficiellement, les populations urbaines de la côte nord-africaine embrassèrent l’islam, plus valorisant, à leurs yeux, que la religion byzantine trop lointaine, à laquelle se référait une administration corrompue. De nombreux groupes berbères retranchés dans le massif de l’Atlas et au-delà du Sahara résistèrent à la mainmise des conquérants. Les minorités arabes s’appuyant sur ces convertis, établirent des principautés en Algérie et au Maroc, établissant de l’Indus à l’Atlantique un grand ensemble commercial où les marchands pouvaient circuler et échanger leurs produits en toute liberté grâce à une monnaie d’or, le dinar. La logique poussa ces derniers à développer le commerce transsaharien pour accéder au royaume du Ghana, qui avait établi sa notoriété sur l’exploitation des mines d’or du Haut-Sénégal-Niger.
Au Soudan oriental, les États chrétiens furent conquis ; seul le royaume chrétien de Nobatia fut assez fort pour résister aux envahisseurs et signer un traité qui lui permit de rester indépendant pendant six cents ans. Le long de la côte orientale, les commerçants arabes de Mascate et d’Oman, prenant la suite des commerçants indiens du Gujarat, fondèrent des comptoirs (VIIIe siècle) qui connurent la prospérité et la paix jusqu’à l’arrivée de Vasco de Gama, au début du XVIe siècle.
Le commerce transsaharien s’établit à partir du VIIIe siècle. Les caravanes et les propagandistes musulmans propagèrent les valeurs politiques, religieuses et sociales de l’islam, mais eurent peu de prise sur les populations noires animistes jusqu’à l’arrivée des Almoravides, qui entreprirent de mettre la main sur le commerce de l’or et d’islamiser la région par la force en lançant une guerre sainte contre les païens (XIe siècle).
Plusieurs dynasties se développèrent en Afrique du Nord (Almoravides, Almohades, Idrissides, Fatimides en Tunisie puis en Égypte). Au XIVe siècle, le Soudan resté chrétien fut submergé par les armées des mamelouks d’Égypte. Les Turcs ottomans conquirent l’Égypte en 1517 et, en l’espace de cinquante ans, établirent un contrôle nominal sur la côte nord-africaine. Toutefois, le véritable pouvoir restait aux mains des mamelouks, qui régnèrent sur l’Égypte. Les Éthiopiens furent submergés par les armées du sultan d’Adal, mais, en 1542, ils repoussèrent les musulmans avec l’aide des Portugais conduits par le fils de Vasco de Gama.
5.2.2 Afrique occidentale
En Afrique occidentale se formèrent des royaumes dont l’économie reposait sur le commerce transsaharien. L’or et les esclaves étaient envoyés vers le nord en échange de tissus et d’outils tandis que se développaient les échanges entre le Sahara, qui fournissait le sel, la savane, qui donnait le mil, et la forêt où poussait la noix de cola.
5.2.2.1 Ghana
Le premier de ces États, le royaume du Ghana, émergea à partir du Ve siècle apr. J.-C. dans le sud-est de l’actuelle Mauritanie, sur le site de Koumbi Saleh. Vers le début du XIe siècle, la cour du Ghana comptait des conseillers musulmans. Les marchands musulmans vivaient dans des grands quartiers réservés, d’où ils dirigeaient un commerce lucratif à grande échelle. À la fin du XIe siècle, le Ghana fut détruit par les Almoravides, un mouvement intégriste fondé par les Berbères sanhadja. Puis le mouvement se scinda ; un groupe se dirigea vers le nord à la conquête du Maroc, fonda Marrakech et conquit l’Espagne musulmane, trop tiède à ses yeux, l’autre partit vers le sud et s’empara du Ghana (vers 1076). Au siècle suivant, les Soussous du Fouta-Djalon, anciens vassaux du Ghana, prirent le contrôle de la région, mais durent se soumettre à l’empire du Mali dont la capitale se trouvait à Niani, dans le nord-est de la Guinée actuelle (vers 1240).
5.2.2.2 Mali et Songhaï
L’empire du Mali s’est développé vers le début du XIe siècle dans le cours supérieur du Sénégal et du Niger à partir d’un ensemble de peuples de langue mandé. Au milieu du XIIIe siècle, l’État commença son expansion sous la direction de Soundiata Keita dont les successeurs se convertirent à l’islam. L’empire connut son apogée sous le règne du mansa (roi) Moussa, qui conquit la célébrité lors d’un fastueux pèlerinage à La Mecque (1324-1325) au cours duquel il distribua des pièces d’or en telle quantité que le cours du métal s’effondra sur les marchés du Caire. Il établit des relations diplomatiques avec la Tunisie et l’Égypte, et fit venir des enseignants et des artisans ; à cette époque, le Mali figurait sur les cartes européennes.
Après 1400, l’empire déclina et le royaume de Gao, fondé en 1464 par Sonni Ali Ber, le roi des Songhaï, émergea à son tour. Sous Askia Mohammed, l’Empire songhaï s’étendit de l’Atlantique au lac Tchad sur 2 500 km, et donna à Tombouctou, un comptoir commercial au départ de la route transsaharienne vers le Maghreb, ses heures de gloire. Mais Tombouctou fut détruite par une expédition marocaine équipée d’armes à feu (les premières à être utilisées au sud du Sahara), envoyée par le sultan Ahmad al-Mansur qui voulait mettre la main sur le commerce de l’or (1591).
Par la suite, des petits royaumes (Macina, Gonja, Ségou, Kaarta) tentèrent de dominer l’Ouest africain, mais ils ne purent ranimer le commerce transsaharien en déclin par suite de l’ouverture des comptoirs commerciaux européens sur la côte de la Guinée à partir du XVIe siècle.
5.2.2.3 États haoussa et Kanem-Bornou
À l’est de l’Empire songhaï, entre le fleuve Niger et le lac Tchad, se développèrent les cités-États des Haoussa et l’empire de Kanem-Bornou. Les États haoussa (Biram, Daura, Katsina, Zaria, Kano, Rano et Gobir) se formèrent vers le Xe siècle et tirèrent profit de la chute de l’Empire songhaï. Le commerce transsaharien se déplaça vers l’est et passa sous le contrôle de Katsina et de Kano, qui devinrent les centres d’un commerce et d’une vie urbaine florissants. L’islam fut introduit au XIVe siècle dans les États haoussa depuis le Kanem-Bornou.
Le Kanem fut fondé au VIIIe siècle au nord et à l’est du lac Tchad et formait un État doté d’une structure assez lâche. Il fut d’abord dominé par un peuple nomade, les Zaghaouas, qui furent supplantés par une nouvelle dynastie, les Saifaouas. Les nouveaux dirigeants se convertirent à l’islam vers le XIe siècle. À la fin du XIVe siècle, poussés par les Boulalas nomades qui avaient envahi leur région, les sultans du Kanem investirent la région du Bornou. Le plus célèbre des dirigeants bornouans fut maï Idris Alooma (1580-1617) ; il introduisit les armes à feu achetées aux Turcs ottomans. À son apogée, le Kanem-Bornou contrôlait les routes du Sahara oriental, mettant l’Afrique centrale en liaison avec l’Égypte et la Libye ; il amorça un long déclin à partir du XVIIe siècle.
5.2.2.4 Expansion de l’islam
À l’époque des grands empires sahéliens (Xe-XVIe siècles), la vie des agriculteurs et des pêcheurs s’améliora dans la mesure où l’islam, associé aux nouveaux centres urbains, avait favorisé l’expansion économique et l’émergence d’une classe dirigeante et d’une bourgeoisie vivant du commerce à moyenne et longue distance. La conversion à l’islam était l’aboutissement normal de cette évolution sociale et économique. Les populations rurales, quant à elles, restaient pour la plupart attachées à la religion traditionnelle, ou continuaient à en perpétuer certaines pratiques.
C’est à travers les Kountas, des nomades arabo-berbères, que les confréries religieuses musulmanes (tariqa) commencèrent à s’implanter en Afrique occidentale. Ainsi, la spiritualité prêchée par la Qadiriyya à partir du milieu du XVIe siècle trouva un terrain favorable chez les populations de la boucle du Niger. Au cours de cette période, la pratique religieuse déclina au sein de la classe dirigeante et l’islam devint une religion individuelle, plutôt qu’une religion d’État.
Au début du XIXe siècle, les Toucouleur, emmenés par El-Hadj Omar, relancèrent le mouvement d’islamisation à partir du Fouta-Toro, dans la haute vallée du Sénégal. D’autres mouvements réformateurs, agissant souvent en réaction à la poussée européenne, virent le jour chez les Peul et les Mandingues. Les anciens pouvoirs furent renversés et remplacés par des États théocratiques. Entre 1804 et 1810, dans les États haoussa, Ousman dan Fodio s’appuya sur les Peul, prit la tête d’un mouvement religieux qui renversa les dirigeants haoussa et fonda l’empire du Sokoto, dans le nord du Nigeria. Sa tentative d’investir le Bornou se heurta à la résistance des chefs religieux locaux. Peu après sa mort, son empire fut repris en main par son fils, Muhammad Bello (1817).
Un autre État théocratique fut créé dans le Macina par Cheikou Amadou, un marabout peul qui lança une guerre sainte contre les Bambara animistes et se tailla un royaume dans le Macina (la plaine inondable entre Tombouctou et Djenné). À sa mort, en 1844, son fils prit le pouvoir, mais en 1862 son petit-fils se heurta à El-Hadj Omar qui s’empara de la région. Le conquérant toucouleur ne profita guère de sa victoire car les populations se soulevèrent et El-Hadj Omar se tua dans une grotte du pays dogon (1866).
5.2.3 Afrique orientale
Le Périple de la mer Érythrée (100 apr. J.-C.), un récit laissé par un marin grec, évoque les échanges commerciaux à travers l’océan Indien entre l’Afrique, l’Arabie et l’Inde, et fait état pour la première fois de l’existence des vents de mousson qui permirent l’essor du commerce maritime dans la région. On pense que les immigrants africains et indonésiens atteignirent Madagascar à peu près à la même époque (Ier millénaire apr. J.-C.), apportant de nouvelles denrées alimentaires, notamment la banane, et de nouvelles méthodes de cultures, comme l’irrigation.
Les Arabes avaient établi des comptoirs sur la côte dès le VIIIe siècle (Sofala au Mozambique), probablement à l’emplacement de comptoirs encore plus anciens mis en place par les premiers navigateurs indiens. L’ivoire, l’or, le minerai de fer et les esclaves constituaient les principales exportations. Vers le XIIIe siècle, il existait plusieurs cités-États le long de la côte est-africaine, qui était connue comme le pays des Zendj. On y trouvait Mogadicio, Malindi, Lamu, Mombasa, Zanzibar, Kilwa, Pate et Sofala. Une civilisation urbaine apparut. Elle s’appuyait sur le swahili, une langue à structure bantoue dont le vocabulaire fait appel à des langues parlées par les commerçants (arabe, persan, gujarati, bantou, puis portugais, anglais et français). Les classes dirigeantes étaient des métis arabo-indo-africains ; les populations étaient bantoues. Les esclaves, porteurs des marchandises, vendus à l’arrivée avec leur charge, étaient nombreux. Ces cités-États vouées au commerce maritime n’établirent des relations suivies avec la région des Grands Lacs, au centre de l’Afrique, qu’à partir du milieu du XIXe siècle (comptoirs de Tabora et d’Oujiji sur le lac Tanganyika).
La région des Grands Lacs pratiquait déjà la métallurgie du fer à la veille de notre ère, comme le montrent les découvertes faites au Rwanda et au Burundi. Les États de la région émergèrent vers le XIVe siècle et prirent la forme d’une monarchie sacrée dont le symbole politique était le tambour, transmetteur des ordres royaux. On sait peu de choses sur cette première période historique, sinon que les traditions orales évoquent l’existence d’un grand empire dit de Kitara ou de Chwezi qui se serait développé sur le Rwanda et le sud de l’Ouganda actuels. D’autres royaumes furent supplantés par une vague de peuples, les Luos, venus du Soudan, qui poursuivirent leur migration vers le sud. Parmi ces États des Grands Lacs, le Bunyoro fut le plus puissant jusqu’à la seconde moitié du XVIIIe siècle. Puis le Buganda, à l’est du lac Victoria, commença son expansion. Une administration centralisée se développa, dont les chefs et sous-chefs de districts étaient nommés par le souverain, le kabaka (roi).
Au sud, au Rwanda, puis au Burundi, une aristocratie pastorale, établie sur l’élevage des bovins, et fondée par les Himas, ou Tutsi, contrôla les peuples bantous défricheurs de clairières établis de longue date dans la région, et s’opposa fermement à l’action des négriers arabes. Le Rwanda est, de tous les États d’Afrique, celui dont la formation est la plus ancienne. Les problèmes que connaît ce pays sont plus d’origine sociale et politique qu’ethnique, les Banyarwanda (« gens du Rwanda »), dominés par la même culture, vivant en complémentarité économique et sociale depuis des siècles.
5.2.4 Afrique centrale
Les États d’Afrique centrale sont encore moins bien connus. Dans les savanes du Zaïre, au sud des forêts pluviales, les peuples de langue bantoue fondèrent des communautés agricoles dès le Ier millénaire. Dans la région des savanes centrales correspondant à peu près au Shaba actuel se développa un commerce entre l’Atlantique et l’océan Indien, fondé sur l’exportation du cuivre fondu en croisettes de différentes dimensions utilisées comme monnaie. Le royaume du Kongo, fondé vers le XIVe siècle, contrôlait le nord de l’Angola actuel, jusqu’à l’embouchure du Congo. Il tenait sa richesse de sa connaissance de la métallurgie du fer et des échanges qu’il pratiquait avec les populations de la forêt. Son fondateur était vénéré comme un roi-forgeron qui avait apporté la civilisation (les outils de fer pour défricher la terre, les lances pour la défendre). Les Portugais prirent contact en 1482 avec ce royaume, entretenant avec lui des relations égalitaires durant un demi-siècle.
Dans la région située entre la rivière Kasaï et le lac Tanganyika, de nombreux petits royaumes s’organisèrent vers 1500 pour former l’Empire luba sous l’autorité de Kongolo, son fondateur mythique. Vers 1600, un des plus jeunes fils de la dynastie quitta le royaume et fut à l’origine de l’Empire lunda, dont les souverains prirent par la suite le titre de Mwata Yamvo. Comme tous les royaumes de la forêt soumis à la croissance démographique, l’Empire lunda se disloqua, et les héritiers fondèrent de nouveaux royaumes comme le Bemba, le Kasanje et le Kazembe. Entre 1750 et 1850, ce dernier domina le sud du Shaba et les régions méridionales.
5.2.5 Afrique australe
La tradition orale et l’archéologie ne permettent pas de se faire une idée précise du peuplement de l’Afrique australe au Ier millénaire, des migrations, de l’absorption ou de la scission des peuples. En Afrique australe, les Karangas, des immigrants bantous, furent les ancêtres des Shonas de l’actuel Zimbabwe. Les Karangas semblent être les édificateurs des étonnantes structures de pierres qui couvrent la région. Le royaume de Monomotapa succéda à ce premier royaume du Zimbabwe qui, au Moyen Âge, exportait son minerai de fer et de cuivre jusqu’aux Indes par le port de Sofala, près de l’embouchure du Zambèze. Sa prospérité reposait également sur l’exploitation de ses mines d’or. À son apogée, au XVe siècle, la sphère d’influence du Zimbabwe s’étendait du fleuve Zambèze au Kalahari, à l’océan Indien et au fleuve Limpopo.
À l’aube du XIXe siècle, les peuples de langue bantoue avaient repoussé vers le désert ou assimilé leurs prédécesseurs bochimans dans le sud de l’Afrique. Au début du XIXe siècle, les pressions démographiques et la famine entraînèrent une succession de guerres et des mouvements migratoires importants, le « Mfecane » (bouleversement). Vers 1816, Chaka, le chef d’un clan des Ngounis, entreprit d’éliminer le système de clan et de le fondre en un seul peuple, ama zoulou (« ceux du ciel »), en forçant les clans annexés et les prisonniers ennemis à changer de nom et à adopter une langue unique. Fuyant devant les Zoulous, les tribus vaincues écrasèrent ou repoussèrent les peuples plus éloignés. Les Ndwandwes, dirigés par Sobhuza, fondèrent le royaume de Swazi (1820). Les Ngounis formèrent cinq royaumes et effectuèrent de nombreuses incursions militaires entre le lac Victoria et le Zambèze (1848). Soshangane émigra vers le sud du Mozambique et fonda l’État de Gaza vers 1830. Dans le Nord, les Kololos se heurtèrent aux Lozis pour la domination de la région. Les Ndebele émigrèrent vers l’est (1824-1834) puis vers le nord (1837) jusque dans l’actuel Zimbabwe, où ils fondèrent le Matabélé.
5.3 Impérialisme européen
5.3.1 Établissement des zones d’influence
Henri le Navigateur, prince de Portugal, fut l’initiateur des premières expéditions autour de l’Afrique, qui débutèrent en 1434 et aboutirent au doublement du cap de Bonne-Espérance par Bartolomeu Dias en 1488 et à la découverte de la route des épices (l’océan Indien) par Vasco de Gama (1497-1498). Les Portugais établirent des comptoirs (fort d’El Mina sur la Côte-de-l’Or en 1482) et furent bientôt suivis par les Français, les Hollandais et les Anglais. Les nouveaux venus négociaient avec les peuples côtiers les produits africains locaux (or, ivoire, gomme, peaux d’animaux) et les esclaves contre de la verroterie, des objets de mauvaise qualité et des fusils sommaires. Partout où ils accostèrent, les ensembles commerciaux et politiques existants ou en cours de formation furent perturbés (disparition du grand commerce transsaharien et des grands empires), et les systèmes économiques et religieux modifiés (économie de traite ; introduction du christianisme) au profit d’un commerce inégal ou « honteux » (traite négrière).
5.3.1.1 Afrique occidentale et centrale
Lorsque l’importance économique des États de la savane déclina, les États de la côte prospérèrent et augmentèrent leur puissance. Des conflits surgirent bientôt entre les peuples côtiers pour le contrôle des routes commerciales. Les expéditions pratiquaient le commerce triangulaire : elles ramenaient sur la côte encore plus d’esclaves pour les marchands européens qui les négociaient en Amérique contre des produits locaux (coton, peaux) qu’ils rapportaient en Europe avant de repartir sur les côtes d’Afrique remplir leurs navires de nouveaux esclaves.
Au cours des quatre siècles du commerce des esclaves, des millions d’Africains furent victimes de ce trafic de vies humaines. La plupart furent capturés par d’autres Africains et échangés contre différents biens de consommation. Le premier grand royaume à tirer profit du commerce des esclaves fut le Bénin, dans l’actuel Nigeria, fondé au XIIe siècle. Vers la fin du XVIIe siècle, le Bénin fut supplanté par les royaumes du Dahomey et d’Oyo. Au milieu du XVIIIe siècle, les Ashanti de l’actuel Ghana commencèrent leur ascension. Sous l’asantehene (roi) Osei Kojo (qui régna de 1764 à 1777), ils s’approchèrent des comptoirs commerciaux européens établis le long de la Côte-de-l’Or. Plus à l’est, le royaume yoruba d’Oyo déclina à la fin du XVIIIe siècle, entraînant l’intervention des Peul du nord. Vers 1835, Oyo fut abandonnée, mais les Peul furent repoussés à la bataille d’Oshogbo (vers 1840).
À la fin du XVIIIe siècle, les sociétés philanthropiques britanniques s’opposèrent au commerce des esclaves. À la suite de la décision Mansfield, qui avait libéré les esclaves au Royaume-Uni en 1772, des projets furent établis pour la création d’une colonie d’esclaves libérés en Afrique occidentale. La première tentative (1787-1790) dans la baie de Saint-Georges (en Sierra Leone) fut un échec. Une seconde tentative, lancée par les abolitionnistes, aboutit à la fondation de Freetown, dans la même région (1792). L’exemple de la Sierra Leone attisa l’intérêt des libéraux américains et, au début de 1822, une société philanthropique américaine, l’American Colonization Society, fonda sa propre colonie du Liberia.
5.3.1.2 Afrique orientale
Lorsque les Portugais prirent contact avec le royaume du Kongo dans les années 1480, ils s’allièrent avec le souverain qui se convertit au christianisme. Toutefois, le commerce des esclaves, introduit de force par les Portugais, attisa les conflits locaux (à cette époque, près de la moitié des esclaves envoyés vers les Amériques étaient originaires de cette région).
À partir du milieu du XVIe siècle, les colons portugais profitèrent de l’éloignement de Lisbonne pour imposer leur loi aux souverains kongolais dont le royaume finit par s’effondrer. Dans le sud, ils fondèrent Luanda (en 1575) pour servir de base arrière à leur expansion vers l’arrière-pays (qu’ils ne soumirent réellement que vers 1920). Sur la côte d’Afrique orientale, ils soumirent le Monomotapa et isolèrent le Mozambique du commerce arabe. Les expéditions de Vasco de Gama puis d’Albuquerque entraînèrent la destruction de nombreuses cités-États (Kilwa, Ormuz à l’entrée du golfe Arabo-Persique).
La côte d’Afrique de l’Est retomba au pouvoir de gouvernements locaux ou des marchands musulmans en 1698. Au XVIIIe siècle, elle passa sous le contrôle des sultans d’Oman qui finirent par s’installer à Zanzibar où le sultan Sayyid Saïd transféra le siège du sultanat (début du XIXe siècle). Il poussa les commerçants swahili à nouer des liens commerciaux avec la région des Grands Lacs et à y établir des comptoirs. C’est avec leur aide que les explorateurs britanniques Burton et Speke cherchèrent les sources du Nil en 1858. Lié à celui de l’ivoire, le commerce d’esclaves fut actif dans la région, de nombreux Africains étant capturés pour travailler dans les plantations de clous de girofle à Zanzibar et pour les marchés d’esclaves du Proche-Orient.
En Éthiopie, l’arrivée des Portugais avait permis de repousser une invasion musulmane en 1542. Toutefois, à la suite de querelles doctrinales entre coptes orthodoxes et jésuites portugais catholiques, les Portugais furent expulsés en 1632. L’Éthiopie entra alors dans une période d’isolement et, au XVIIIe siècle, la monarchie fut au bord de l’effondrement. Elle s’ouvrit de nouveau au monde occidental après la chute du négus Kassa (Théodoros II) et l’accession au pouvoir de ses successeurs, dont Ménélik II qui s’appuya sur les Européens pour moderniser son pays.
5.3.1.3 Afrique australe
En 1652, les Hollandais, qui avaient besoin d’une escale sur la route des Indes orientales (Indonésie), s’établirent autour de la ville du Cap. Ils furent suivis par des fermiers adeptes d’une interprétation rigoriste de la religion, les Boers (« fermiers », en néerlandais). En 1795, les Britanniques occupèrent l’Afrique du Sud, mais ne purent retenir les Boers, qui émigrèrent vers les riches vallées du Vaal où ils rencontrèrent les Zoulous et d’autres peuples bantous se dirigeant vers le sud. Il s’ensuivit une succession de « guerres cafres » où les Africains, moins bien armés, subirent de lourdes pertes (bataille de Blood River, 1840). Les Boers fondèrent d’éphémères républiques boers (Transvaal, État libre d’Orange) mais se heurtèrent aux Anglais qui avaient mesuré l’importance de la région après la découverte du diamant à Kimberley en 1867.
5.3.2 Partage du territoire
À la fin du XVIIIe siècle, l’intérêt scientifique et la recherche de nouveaux marchés stimula une période d’exploration. L’explorateur britannique James Bruce atteignit la source du Nil Bleu en 1770 ; son compatriote Mungo Park visita Ségou sur le Niger (1796) ; le Français René Caillié atteignit Tombouctou en 1828 et l’Allemand Heinrich Barth visita la même cité quelque temps plus tard à partir de Tripoli et du lac Tchad ; le missionnaire britannique David Livingstone explora le Zambèze et, en 1855, découvrit les chutes Victoria ; en 1863, les explorateurs britanniques John Hanning Speke, venant du sud, et Samuel Baker, venu du nord, résolurent en partie le mystère des sources du Nil. À la suite de ces explorateurs arrivèrent les missionnaires chrétiens puis les marchands européens.
Avec le développement des intérêts privés en Afrique, l’engagement européen s’intensifia. Les Français entamèrent la conquête de l’Algérie et du Sénégal dans les années 1830. L’occupation systématique de l’Afrique tropicale commença au cours de la seconde moitié du siècle dans le sillage des explorations. Les premières missions européennes qui pénétrèrent à l’intérieur se heurtèrent aux États en voie de constitution, mais le continent avait été ravagé par la traite des Noirs et l’importation de fusils. Les chefs africains ne purent s’opposer à la pénétration européenne, qui avait abandonné l’économie de traite (échange des produits de la cueillette contre des biens manufacturés sans valeur) pour la recherche de matières premières destinées à alimenter les usines européennes.
En 1876, le roi des Belges Léopold II fonda l’Association internationale africaine, une société privée chargée de l’exploration et de la colonisation au Congo à son seul profit. Son principal agent fut l’explorateur et journaliste américain Henry Stanley. En 1884, la rivalité entre les puissances européennes à la recherche de nouveaux territoires aux frontières inexistantes menacèrent les relations internationales. Voir aussi Empire britannique ; Français, empire colonial.
À la conférence de Berlin (1884-1885), les puissances occidentales auxquelles s’était joint la Turquie définirent leurs sphères d’influence, laissant la délimitation des frontières encore inconnues à une date indéterminée. L’accord principal concernait surtout la liberté de navigation sur les fleuves Congo et Niger. En fait, sans le formuler explicitement, les puissances de l’époque se partageaient ce que le roi Léopold II avait appelé le « gâteau africain ». Au cours des quinze années suivantes, de nombreux traités furent négociés entre les nations européennes, appliquant ou modifiant les clauses de la conférence. La crise de Fachoda, en 1899, marqua le renoncement de la France aux territoires faisant partie de la vallée du Nil, et le triomphe de la politique impérialiste britannique dite « du Cap au Caire ».
Aucun État africain n’avait été invité à la conférence de Berlin. Les décisions prises se heurtèrent à une résistance lors de leur application partout où la situation le permettait. Les Français firent face à une révolte en Algérie (1870) et mirent longtemps à contrôler le Sahara (1881-1905 ; 1920 en Mauritanie). Dans l’ouest du Soudan, Samory Touré et Ahmadou, fils et successeur d’El-Hadj Omar, tentèrent, en vain, de garder leur indépendance. Le Dahomey fut occupé par les forces françaises en 1892 et le Ouaddaï, au Tchad, fut la dernière région à tomber aux mains des Français (bataille de Kousséri contre Rabah, 1900).
Les Britanniques connurent une résistance similaire avec les Boers d’Afrique du Sud au cours des périodes 1880-1881 et 1899-1902 (voir Boers, guerre des). Des émeutes se déclarèrent dans le pays ashanti (Côte-de-l’Or) entre 1893 et 1900, ainsi qu’en Sierra Leone (1897). La conquête des États haoussa dans le nord du Nigeria se heurta à une forte résistance (1901-1903, révolte de Sokoto en 1906).
Les Allemands, qui avaient colonisé, dans les années 1880, les actuels États de la Tanzanie, du Burundi et du Rwanda sous l’appellation d’Afrique-Orientale allemande, tentèrent d’exterminer les Hereros de Namibie (1904-1908) et, dans l’actuelle Tanzanie, durent faire face à la révolte des Maji-Maji (1905-1906). Seule l’Éthiopie de l’empereur Ménélik II (qui régna de 1889 à 1909) résista à la conquête européenne (victoire d’Adoua sur l’Italie, 1896).
5.4 Développement au XXe siècle
5.4.1 Période coloniale
Une fois les territoires pacifiés, les Européens construisirent des routes et des chemins de fer afin de faciliter l’acheminement des matières premières vers les ports. Ils firent entrer les populations dans leur système économique en instaurant un système d’impôts payables en numéraire grâce à l’introduction de cultures industrielles, dites de « rente » (arachide, coton, huile de palme, sisal), ou sous la forme de travail non rémunéré (le « travail forcé ») pour la construction des infrastructures (routes, barrages). Au cours de la Première Guerre mondiale, les territoires africains allemands furent conquis et la Société des Nations en fit des territoires sous mandat des puissances alliées. Des dizaines de milliers d’Africains furent réquisitionnés pour combattre dans les armées alliées sur les champs de bataille européens. La résistance à la guerre se limita à la courte rébellion de 1915 au Nyasaland (Malawi) conduite par John Chilembwe, homme d’église africain.
Après la Première Guerre mondiale, la colonisation accorda une plus grande attention à l’enseignement, aux services médicaux et à l’aide au développement, ainsi qu’à la sauvegarde des droits fonciers des Africains dont on voulait faire de futurs consommateurs. Néanmoins, les colonies blanches, comme l’Algérie, la Rhodésie du Sud (aujourd’hui Zimbabwe) et le Kenya, obtinrent une certaine autonomie interne. Entre les deux guerres, différentes formes de mouvements nationaux et de protestations africains émergèrent. Mais leurs activités se limitaient aux Africains d’éducation occidentale. Des partis de masse se formèrent uniquement en Égypte et en Algérie. L’Éthiopie fut envahie par les Italiens en 1936 et ne regagna son indépendance qu’au cours de la Seconde Guerre mondiale. Pendant cette guerre, les Africains furent encore plus nombreux à servir dans les armées alliées, et constituèrent même la majeure partie des troupes qui remportèrent les premières victoires de la France libre (prise de Koufra, sous les ordres du général Leclerc, 1941).
5.4.2 Accession à l’indépendance
Après la Seconde Guerre mondiale, les puissances coloniales européennes étaient physiquement et psychologiquement affaiblies et la balance pencha vers les États-Unis et l’Union soviétique, deux nations dépourvues de colonies africaines.
En Afrique du Nord, la France se heurta dès 1947 à des revendications nationalistes violentes auxquelles répondit son refus de voir appliquer des réformes en faveur des populations locales. La guerre d’Algérie, conduite par des dirigeants comme Ferhat Abbas et Ahmed Ben Bella, commença en 1954 et se poursuivit jusqu’à l’indépendance du pays en 1962, six ans après l’indépendance du Maroc et de la Tunisie. En Afrique noire, après avoir mis en place l’Union française, la France prépara ses colonies à l’autonomie par le vote de la loi-cadre Defferre (1956), puis instaura la Communauté française (1958). Dans les années soixante, la décolonisation devint effective avec la venue au pouvoir d’anciens représentants africains à l’Assemblée nationale (Léopold Sédar Senghor au Sénégal, Modibo Keita au Mali, Félix Houphouët-Boigny en Côte d’Ivoire, Sékou Touré en Guinée).
Dans les territoires britanniques, le changement s’accéléra également. Les partis nationalistes, qui recrutaient dans des groupes sociaux, ethniques et économiques aussi larges que possible, commencèrent à se former. Le Soudan accéda à l’indépendance en 1956. Pendant les années 1950, les activités du mouvement terroriste Mau-Mau au Kenya et le charisme de dirigeants populaires, comme Kwame Nkrumah (Ghana) ou Julius Nyerere (Tanzanie), accélérèrent le processus. L’indépendance du Ghana, en 1957, déclencha une réaction en chaîne de revendications nationalistes.
À la fin des années 1970, presque toute l’Afrique était indépendante, sauf les possessions portugaises d’Angola, du Cap-Vert, de Guinée-Bissau, de São Tomé et du Mozambique, qui accédèrent à l’indépendance en 1974-1975 après des années de luttes violentes, à l’occasion de la révolution portugaise. La France donna l’indépendance aux Comores en 1975 (sauf à l’île de Mayotte qui avait voté contre), Djibouti l’obtint en 1977. En 1976, l’Espagne céda le Sahara espagnol qui fut alors partagé entre la Mauritanie et le Maroc. La Mauritanie ne put résister à la guérilla des nationalistes sahraouis et abandonna sa zone au Maroc en 1979. En septembre 1997, le Maroc et le front Polisario ont passé un accord sur l’organisation par les Nations unies d’un référendum d’autodétermination en décembre 1998. Le Zimbabwe accéda légalement à sa seconde indépendance en 1980 après des années de lutte. La dernière grande entité dépendante du continent fut la Namibie, qui se libéra en 1990.
5.4.3 L’Afrique contemporaine
Les nouveaux États africains furent confrontés au problème de l’État-nation. Les membres fondateurs de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) établirent le principe de l’intangibilité des frontières pour éviter les conflits territoriaux qui étaient nés du découpage arbitraire des pays à la conférence de Berlin en 1884-1885.
Lorsque leurs pays accédèrent à l’indépendance, les mouvements nationalistes dominants et leurs dirigeants s’installèrent de manière permanente au pouvoir. Ils appelèrent à l’unité nationale et au système du parti unique pour éviter le tribalisme et le vote ethnique, en ayant parfois à faire face à des conflits sanglants, comme celui de la guerre du Biafra à la fin des années 1960. Lorsque ces gouvernements se révélèrent incapables de répondre aux attentes des peuples, l’armée occupa le devant de la scène, promettant de « remettre le pouvoir aux civils » dans un délai déterminé. Ces militaires, souvent issus des classes populaires et parfois aidés par les Occidentaux, que ce soit par des armées régulières ou par des mercenaires, se posaient en gardiens efficaces et sincères des intérêts du peuple. Le goût du pouvoir fit son œuvre et seules la dégradation économique et la pression des bailleurs de fonds occidentaux (notamment celle du Fonds monétaire international) les forcèrent à tenir leurs promesses, après bien des réélections à des taux approchant les 100 p. 100 ! Le retour au multipartisme s’est opéré progressivement au début des années 1990.
À la fin des années 1980 et au début des années 1990, les conflits interminables au Tchad, en Somalie, au Sahara, en Angola, au Liberia et en Sierra Leone déstabilisèrent les gouvernements. La fin de la guerre civile en Éthiopie, en 1991, fut marquée par l’indépendance de l’Érythrée en 1993. En avril 1994, des massacres ensanglantèrent le Rwanda, touchant tout particulièrement les Tutsi et les Hutu modérés, après la mort des présidents hutu rwandais et burundais dans la destruction de leur avion par un missile. Ce conflit contribua à envenimer la situation dans l’ensemble de la région des Grands Lacs. En 1996, des groupes armés pénétrèrent au Zaïre et contribuèrent à développer dans l’est de ce pays une rébellion, qui progressa en 1997, renversa le régime du maréchal Mobutu et porta au pouvoir Laurent-Désiré Kabila, qui se proclama président de la nouvelle République démocratique du Congo.
Le poids politique du continent a singulièrement diminué dans le monde en raison de sa situation économique. L’Afrique n’a pas encore fini de panser les plaies des conflits liés à la guerre froide qui ont éclaté en Angola et au Mozambique. Sa grande victoire, à la veille de l’an 2000, est la fin de la politique de ségrégation raciale en Afrique du Sud au début des années 1990 et le transfert du pouvoir à la majorité noire après les élections de 1994.