(sudquotidien) – Depuis des années, le poisson devient de plus en plus rare dans les côtes sénégalaises. Une situation longtemps décriée par les acteurs de la pêche artisanale qui en souffrent les premiers. Les pêcheurs de Soumbédioune subissent de plein fouet cette situation et accusent les bateaux étrangers d’être responsables de leur mal.
En cette journée ensoleillée du jeudi 02 mars, dans le quai de pêche de Soumbédioune, plusieurs pirogues attendent le long de la plage. Autour d’un canoé qui vient d’accoster, un groupe de pêcheurs est en pleine discussion. Aliou Gaye, un d’entre eux, se plaint de la situation actuelle de leur activité. « La pêche ne nous apporte plus rien. Il n’y a plus de poissons dans la mer. Les bateaux étrangers épuisent les ressources halieutiques devant le regard complice de nos autorités », regrette-t-il en étalant son cirage marin sur la bordure d’une pirogue. A quelques encablures, debout face à la mer, les mains dans le dos, Abdoulaye Diop guette une pirogue, celle de ses enfants partis en mer. Le sexagénaire confirme les propos d’Aliou Gaye. « Je ne pêche plus, ce sont mes enfants qui vont en mer. Mais les époques sont très différentes. A notre époque, nous n’avions pas besoin de faire une centaine de kilomètres pour remplir nos pirogues. Aujourd’hui, les pêcheurs font des jours en mer et parfois ils reviennent bredouilles ». Pour M. Diop, cette situation « regrettable » est due aux changements climatiques, mais aussi et surtout à la surpêche, avec l’octroi de licences de pêche par l’Etat du Sénégal aux gros chalutiers étrangers. Il appelle l’Etat à penser aux acteurs de la pêche artisanale et réduire le nombre de licences qu’il octroie aux industriels. A quelques mètres, Pape Sy et son camarade sont assis sur une pirogue. Pour le jeune pêcheur, avec la chaleur qui s’annonce, la situation pourrait bientôt changer. « Ces derniers temps, avec la fraicheur, la situation est devenue plus compliquée. Le poisson est introuvable », confie le pêcheur âgé d’une vingtaine d’années. Avant de continuer : « On espère que les choses vont bientôt changer, car la chaleur s’annonce déjà ». un brin d’espoir dans un océan de marasme de la ressource.
« Le prix du poisson est élevé »
Si les pêcheurs se plaignent de la raréfaction des poissons, les consommateurs eux, regrettent les prix élevés de ces derniers. « D’habitude c’est au marché Tilène que je partais pour avoir du poisson, mais depuis un certain temps, pour avoir du poisson frais, je préfère venir ici. Cependant, je pense arrêter d’y venir parce que le poisson est trop cher ici », se plaint Ndèye Ba, habitante du quartier Gueule Tapée. Selon Baye Mor, pêcheur, c’est normal que les prix des poissons connaissent une hausse. « On achète du carburant pour aller en mer. Et avec la raréfaction des poissons, on fait beaucoup de kilomètres pour capturer une petite quantité. On est dans l’obligation de vendre à un prix assez élevé pour s’en sortir », argue le trentenaire.
Avec 720 km de côtes, le Sénégal est l’un des pays les plus poissonneux d’Afrique. La pêche artisanale a toujours été une activité porteuse pour les pêcheurs et les consommateurs du pays. Mais aujourd’hui, sous l’effet combiné de la surpêche et du changement climatique, les poissons se raréfient d’une manière impressionnante, plongeant les acteurs dans le désarroi.
BABACAR NGOM (STAGIAIRE)