LE DEVELOPPEMENT
Voici le sujet :
STÉPHANE MALLARMÉ AFFIRME : « ce n’est pas avec des idées qu’on fait des vers ; c’est avec des mots ».
VOUS DÉMONTREREZ QU’ÊTRE POÈTE, C’EST D’ABORD SAVOIR MANIER LE STYLE AVEC ADRESSE. VOUS JUSTIFIEREZ PAR LA SUITE QUE, PLUS SOCIALES, CES IDÉES PROMETTENT POURTANT UNE MEILLEURE MARCHE EN AVANT DE L’HUMANITÉ. VOUS EXPLIQUEREZ ENFIN QUE D’AUTRES POÈTES PRÉFÈRENT SE SERVIR DES MOTS POUR SOIGNER LEURS MAUX.
En voici une proposition de plan :
- PREMIÈRE PARTIE.
I. Pourquoi certains font-ils de l’esthétique la condition sine qua non pour se faire appeler poète ?
1. Le classicisme (respect des règles d’écriture)
2. Le parnasse (la théorie de l’art pour l’art)
- DEUXIÈME PARTIE.
II. Dans quelle mesure les mots sont-ils capables de sauver l’humanité ?
1. Le romantisme (la révolution industrielle)
2. La négritude (la colonisation)
- TROISIÈME PARTIE.
III. Comment les mots peuvent-ils devenir thérapeutiques ?
1. L’humanisme (lyrisme amoureux ou patriotique)
2. Le romantisme (lyrisme consolateur)
- N.B. :
Beaucoup tolèrent que ces sous-parties (les courants littéraires) soient réunies pour en faire un seul paragraphe, si celui-ci est bien structuré, étant donné qu’il existe plusieurs types de texte argumentatif. Ainsi, des examinateurs sensés admettent même que le candidat se limite à l’invocation d’un seul courant littéraire pour chaque partie (s’il y en a trois), à condition que celui-ci respecte toutes les exigences imposées à un paragraphe argumentatif bien structuré.
Personnellement, je préfère ne pas entrer dans ces querelles d’école qui embrouillent l’élève, d’une école à une autre, d’une classe à une autre, d’un professeur à un autre. J’approuverai plutôt toute démarche cohérente car ce qui est surtout recherché dans un paragraphe argumentatif, c’est la logique fidèle a la consigne. Pour rien au monde je ne sanctionnerai un élève pour avoir produit un paragraphe ou bien une partie où démarche et technique répondent aux attentes canoniques.
En tout état de cause, j’invite les collègues à faire preuve de retenue, à avoir plus de hauteur, à être souple, flexible, pour être à mesure d’approuver toute production écrite conforme aux réelles attentes.
D’ailleurs, pour être plus concret dans mon explication, j’expose ci-après ma propre rédaction suivie de son analyse pour mieux montrer comment construire un texte argumentatif qui répond aux normes standard afin de bien en explorer les arcanes, c’est-à-dire les différentes séquences successives qui l’élèvent.
- LE CAS DU PARAGRAPHE DÉVELOPPÉ
Ce qui suit est mon développement du petit 2 de la première partie, c’est-à-dire le parnasse qui justifie l’importance de l’esthétique.
[D’AUTRES artistes, les parnassiens en l’occurrence, sont pratiquement incontournables lorsqu’on parle d’esthétique, de forme, de travail stylistique.] [C’est parce qu’ils ont D’ABORD commencé par déposséder la poésie de toute fonction utilitaire, quitte à banaliser l’objet observé, le lieu peint, le personnage décrit… afin de donner plus d’amplitude aux mots les plus justes ayant servi à y parvenir ; d’ailleurs, rien de surprenant si ces poètes jettent leur dévolu sur des espaces si éloignés ou des temps très reculés de la « civilisation moderne ». C’est pour eux un bon moyen de ne point exposer leur poésie à une inspiration proche de l’épanchement personnel, liée au militantisme ou relative à une poésie moraliste. ENSUITE, s’ils ont privilégié la poésie plutôt que tout autre, c’est parce que c’est ce genre littéraire qui sait le mieux donner à la forme scripturale son caractère visuel, formel et sonore, ENFIN, les parnassiens se donnent pour mission de se faire artisan comme condition sine qua non de devenir artiste ; en d’autres termes, le poète est à l’image du sculpteur qui taille, lime, cisèle ses mots pour en faire naître une œuvre de beauté.] [Nous en avons l’illustration dans ces propos de Théophile Gautier qui déclare « j’aimerais mieux avoir mon soulier mal cousu que de faire des vers mal rimés » ; il sous-entend par-là être capable de tout négliger, même les thèmes d’ordre social et autres, sauf son texte qu’il ne songe qu’à bien écrire.] [En un mot, chez des artistes tels que les parnassiens, l’art (le style) pour l’art (la beauté), dans le sens propre du terme, passe avant toute autre considération, et ce travail proche de la sculpture s’exécute moins avec des idées qu’avec des mots tout bonnement.]
Quelle est la structure adoptée ci-dessus ?
- PETITE ANALYSE EXPLICATIVE.
Par les crochets qui les délimitent, on parvient à identifier les quatre séquences constitutives de cette production écrite dont la structure est plus simplifiée :
1) L’idée directrice (du début à « travail stylistique »).
Plus courte que toutes les autres, cette séquence sert à annoncer ce dont on parlera tout au long du paragraphe. En une phrase, cette formule introductive sert d’élément déclencheur de l’avis à développer.
2) L’argumentation (de « c’est parce que » à « œuvre de beauté »).
Plus longue que toutes les autres, cette séquence mobilise les principales raisons (deux ou trois) qui justifient l’idée de départ énoncée dans la première séquence. C’est l’endroit où il faut expliquer (du latin « ex » = hors de, et « plicare » = plier). C’est comme si, après avoir formulé l’idée directrice, on cherchait à justifier celle-ci dans une argumentation bien structurée, dans une logique de progression observable et articulée par des connecteurs logiques ou des expressions de transition. Relevez ces mots ou expressions que j’ai employés et écrits en gros caractères et sachez les réemployer à bon escient.
3) L’illustration (de « nous en avons l’illustration » à « bien écrire »).
Cette séquence apporte la preuve littéraire de ce qui a été dit dans l’argumentation. Si ici l’illustration est une citation accompagnée de son analyse succincte en direction de la thèse jusque-là défendue, elle peut aussi être de deux autres natures différentes : un texte connu commenté ou une biographie d’écrivain commentée. Comme on peut le remarquer, introduit par une expression qui illustre (en guise d’exemple, à titre illustratif, pour preuve, etc.) quoi qu’il en soit, l’exemple doit toujours être agrémenté par son commentaire tuteur.
4) La conclusion partielle (de « en un mot » à la fin).
Aussi courtement formulée que l’idée directrice, cette séquence résume ce qui a été finalement retenu dans ledit paragraphe. Toujours introduite par un connecteur qui conclut (en somme, donc, en un mot, pour tout dire, en résumé, ainsi, etc.), elle est une sorte de réponse à une des questions posées dans l’annonce du plan de l’introduction.
- LE CAS DE LA PARTIE DÉVELOPPÉE
Ce qui suit est le développement de la dernière partie qui regroupe la thérapie qu’on connait du lyrisme humaniste et romantique.
[Le lyrisme est une tendance thématique très élastique à l’échelle du temps mais toujours est-il que son rôle thérapeutique est latent, à l’instar de la façon dont humanistes et romantiques en ont fait usage.] [En effet, chez les uns, c’est-à-dire des auteurs du XVIème siècle, le lyrisme personnel de l’auteur est d’une part nostalgique, voire patriotique, nationaliste à la limite ; l’auteur célèbre la France dont il magnifie la culture et l’histoire. C’est le cas de Joachim du Bellay dans la plupart de ses poèmes à l’image de celui qui commence par « France, mère des arts, des armes et des lois » ou encore « Heureux qui, comme Ulysse, a fait un beau voyage ». D’autre part, ce lyrisme est aussi pétrarquiste, amoureux et moraliste, dans la mesure où l’auteur s’exalte, s’extasie, exprime littéralement son profond sentiment qui l’instruit et le pousse à écrire des poèmes dédiés à l’être aimé, comme peuvent le justifier des poèmes de Pierre de Ronsard, tels que « Je plante en ta faveur cet arbre de Cybèle » ou encore « Comme on voit sur la branche au mois de mai la rose ». Néanmoins, il sera bien difficile de parler du lyrisme en faisant abstraction du romantisme parce personne autant qu’eux ne s’était encore si abondamment abandonnés à l’épanchement. C’est parce qu’ils ont découvert que la confidence noie la douleur et, comme les mots le peuvent, ils ne s’en sont point économisés. [Pour preuve, lorsqu’on avait demandé à Alphonse de Lamartine à quoi l’art pouvait bien lui servir, il avoua en ces termes le pouvoir consolateur de ses vers : « j’écrivais moi-même pour moi-même ; ce n’était plus un art ; c’était le soulagement de mon propre cœur qui se berçait de ses propres sanglots ».] [Pour tout dire, que ce soit dans les écrits de poètes de la pléiade ou romantique, les mots qu’on croyait destinés au style ou encore à la révolte peuvent bel et bien servir à exprimer l’intimité sentimentale de l’écrivain par la fonction lyrique que joue la poésie.]
Quelle est la structure adoptée ci-dessus ?
- PETITE ANALYSE EXPLICATIVE.
1) L’idée directrice (du début à « fait usage »).
L’objectif reste le même sauf qu’ici sont énoncés avec précision les deux courants littéraires (l’humanisme et le romantisme) autour desquels on articulera l’essentiel des propos à expliciter dans la séquence suivante.
2) L’exemple argumentatif (de « en effet » à « point économisés »).
Cette structure est un peu plus complexe : pour préciser la particularité propre à chaque tendance liée à son époque, après chaque courant littéraire expliqué dans la même mouvance, on produit une illustration. Toutefois, en termes de volume, cette illustration ne doit ni égaler ni dépasser celui de l’argumentation mais lui être inférieur. De plus, il faut éviter les digressions à laquelle beaucoup sont souvent attirés comme l’appel des Sirènes qui ont failli perdre Ulysse et son équipage ; tous les propos émis doivent tendre vers la démonstration de l’intitulé de la partie concernée. Cette digression, je la surnomme « dissertation tigadégué ». J’entends par cette formule un devoir où l’élève veut, du lyrisme par exemple, tout dire de ce qu’il en sait. Cet élève est à l’image de cette épouse à qui le mari remet 10.000F comme dépense quotidienne parce qu’il n’a pas de menues monnaies. Logiquement, ce dernier attend de recevoir sa monnaie, surtout qu’il doit voyager dans l’après-midi. Il lui précise au passage qu’il voudrait manger du bon « thièbou djeun » (riz au poisson) à treize heures. Personnellement, je ne m’y connais pas du tout en cuisine, mais ce dont je suis sûr, c’est que le « tigadégué », cette délicieuse pâte d’arachides, n’entre pas dans le plat commandé par l’époux. Et je ne comprendrais pas non plus la raison pour laquelle, en se rendant au marché, cette femme s’approcherait du vendeur de « tigadégué ». Donc il ne faut surtout pas ”tigadéguiser” le développement (Mdr !)
3) La conclusion partielle (de « pour preuve » à la fin).
Comme précédemment, cette séquence fait le bilan de ce qui aura été retenu, comme s’il s’agissait de l’aboutissement d’une démonstration. C’est l’endroit où il faut dire où on voulait en venir.
À présent, inspirez-vous de cette explication pour rédiger la dernière partie, celle qui concerne l’engagement.
QUELQUES CONSEILS À CE SUJET (L’ENGAGEMENT)
Quand vous décidez de parler de cette thématique souvent soumise à la réflexion des candidats au bac, abandonnez cette pratique qui consiste à vous limiter à la définition de l’écrivain engagé (le poète devient le porte-parole de son peuple, prend la plume qu’il transforme en arme pour lutter contre les maux qui gangrènent la société, et patati et patata… Mdr !) Si vous voulez être précis, profond, original, sensé, persuasif en un mot, articulez vos propos autour d’événements historiques d’une part mais sans se mettre à produire un texte narratif. Ramassez !
– humanisme (guerres de religion)
– romantisme (révolution industrielle / Napoléon Bonaparte)
– surréalisme (guerres mondiales)
– négritude (colonisation)
D’autre part, expliquez que c’est cet événement historique qui a justifié l’engagement de l’auteur et vous serez sans doute beaucoup plus juste et convaincant.
PETITE PRÉCISION.
- Précision 1. Si le candidat est soumis à un sujet de dissertation constitué de deux parties seulement, dans chacune d’elles, il faut au moins deux paragraphes.
- Précision 2. Si le candidat est soumis à un sujet de dissertation constitué de trois parties, dans chacune d’elles, il a le choix entre :
a) un paragraphe qui fait office de partie
b) deux paragraphes au moins dans chaque partie
- LE CAS DE LA PHRASE DE TRANSITION
a) Emplacement.
Elle se situe entre la fin d’une partie et le début de la suivante.
b) Objectif.
Elle résume ce qui a été dit et annonce ce qui sera dit.
c) Modèle :
– La phrase de transition entre la première et la deuxième partie :
Comme nous venons de le voir à travers le classicisme et le parnasse, la poésie est avant tout une affaire de style certes mais est-ce une bonne raison pour dévaloriser ou discréditer les idées dont le vêtissent d’autres poètes ?
– La phrase de transition entre la première et la deuxième partie :
En somme, pouvant servir à instruire ou à se révolter, ces mots qui, ici, sont d’une grande utilité publique, comme peuvent l’attester l’humanisme et le romantisme, employés dans un but plus personnel, parviennent par ailleurs à soigner le mal du poète.
- LE CAS DE LA TYPOGRAPHIE
On entend par typographie la forme de présentation recommandée lorsqu’on rédige un exercice de production écrite telle que la dissertation.
DANS L’INTRODUCTION ET LA CONCLUSION.
Avec un alinéa au début (décalage de deux à trois carreaux), l’introduction et la conclusion forment un seul bloc, un seul paragraphe. Pas besoin d’aller à la ligne entre les séquences qui constituent chacune d’elles.
ENTRE L’INTRODUCTION ET LA CONCLUSION.
Entre l’introduction et le développement, de même qu’entre le développement et la conclusion, il faut sauter deux ou trois lignes.
POUR LE DÉVELOPPEMENT.
Quant au développement, il s’agit d’un ensemble de paragraphes unis, solidaires. Chacun est précédé d’un alinéa. Pour passer d’un paragraphe à un autre, il faut juste un retour à la ligne et un alinéa.
POUR LA PHRASE DE TRANSITION.
La phrase de transition est à l’image d’un pont et celui-ci n’est ni sur une rive ni sur une autre mais au milieu ; par conséquent, elle est à séparer des parties entre lesquelles elle se situe par un saut de ligne aussi bien avant de la rédiger qu’après l’avoir rédigée.
Issa Laye DIAW – Donneur universel – Professeur de français Lycée d’excellence de Diourbel
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