Qu’est-ce que la décentralisation ?
La décentralisation est un processus consistant pour l’Etat à transférer au profit des collectivités territoriales certaines compétences et les ressources correspondantes.
Celles-ci bénéficient alors d’une certaine autonomie de décision et de leur propre budget (principe de libre administration) sous la surveillance d’un représentant de l’Etat qui n’est pas un supérieur hiérarchique, mais vérifie simplement la légalité des actes émis par les collectivités territoriales.
Ainsi, pour gérer ses affaires, la collectivité décentralisée doit posséder un patrimoine propre, des biens matériels, des agents, une gestion financière exprimée dans un budget.
La naissance de l’acte III de la décentralisation
En 2013, le Président Macky Sall a souhaité renforcer ce processus de décentralisation, via une troisième réforme territoriale et administrative d’ampleur : l’Acte III de la décentralisation. Issu d’une volonté réparatrice des inégalités et incohérences territoriales que l’écosystème territorial traînait depuis les indépendances, l’Acte III met en avant trois objectifs :
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la communalisation intégrale, pour l’homogénéisation des échelons territoriaux quelle qu’en soit leur nature (urbaine ou rurale) ;
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la départementalisation, qui déclasse la région de l’architecture territoriale et administrative au profit des 45 départements ;
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et enfin l’érection de pôles de développement territorial, capables de corriger les inégalités économiques, infrastructurelles, sociales que les régions n’ont pas su combattre (République du Sénégal, 2013).
Cette réforme, qui marque une refondation majeure de l’action territoriale de l’État, a pour ambition d’organiser le Sénégal en territoires viables, compétitifs et porteurs de développement durable.
Fondée sur la territorialisation des politiques publiques, la réforme doit permettre de bâtir le Sénégal à travers la pleine valorisation des potentialités de chaque territoire, dans une démarche multi-acteurs et multi-niveaux apte à garantir la participation de tous les acteurs territoriaux. Elle incarne ainsi une rupture pour le renforcement de la décentralisation et le renouveau de la politique d’aménagement du territoire.
Les grands principes de l’acte III
La communalisation intégrale
Toutes les communautés rurales et les communes d’arrondissement sont érigées en communes, premier ordre de collectivité locale au Sénégal. Ce projet répond à l’impératif d’une gestion de proximité des problèmes des populations et une participation des acteurs locaux à l’impulsion et à la mise en œuvre des stratégies de développement territorial.
Le statut communal se renforce avec la communalisation intégrale, et ainsi la « communauté rurale » disparait dans l’architecture de notre décentralisation.
De nouvelles opportunités sont offertes aux collectivités locales de base, notamment celles du monde rural, pour améliorer, par des équipements, la plate-forme minimale des infrastructures socio-économiques de base, de recruter du personnel qualifié, d’accéder facilement aux financements des partenaires au développement et de la coopération décentralisée.
Enfin, la communalisation intégrale permet à notre pays d’harmoniser son architecture avec ce qui se fait au niveau de la sous-région ou dans le reste du continent.
La suppression de la région, collectivité locale, et la création des pôles de développement économique
L’aménagement du territoire répond à un impératif de rééquilibrage des investissements sur les territoires en fonction des spécificités, avec une vision globale du développement, prenant en compte l’équité, la solidarité, notamment dans le traitement des villes, des zones rurales, transfrontalières et éco géographiques. La réorganisation territoriale doit permettre de mieux répondre aux enjeux et objectifs de développement économique et social.
L’acte III de la décentralisation réorganise le territoire en pôles de développement en fonction des réalités éco-géographiques. Cette démarche offre un cadre plus rationnel et cohérent de contrôle territorial et d’impulsion du développement économique, en reposant sur les exigences d’aires territoriales homogènes au plan socioculturel, éco géographique et économique.
Le département, collectivité locale
Le département est érigé en collectivité locale et reste, dans le même temps, circonscription administrative. Le découpage des départements recoupe, dans bien des cas, le tracé des anciens royaumes ou provinces. La recherche d’un espace vécu comportant une homogénéité socioculturelle et économique et un fort sentiment d’appartenance, justifie le désir de réinvestir le département afin d’en faire un vecteur pour une bonne politique de décentralisation.
Ce niveau correspond donc à une réalité historique et offre l’avantage de former des entités territoriales intermédiaires favorisant une gouvernance locale et un développement territorial mettant en synergie des communes partageant un vécu et des potentialités spécifiques dans une dynamique d’intégration rural-urbain.
Le pari d’une approche en faveur du développement économique
Une bonne politique de l’aménagement du territoire induit l’intégration de la dimension territoriale dans les planifications économiques et sociales, ainsi que le rééquilibrage des investissements selon le principe d’équité et de solidarité.
Dans le cadre d’un processus multi-acteurs, la solidarité, la synergie des interventions et la territorialisation des responsabilités restent des indicateurs importants pour une action territoriale performante. Il faut à cet égard :
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Une réhabilitation de la déconcentration à travers les autorités administratives dans leur rôle d’interlocuteurs territoriaux ;
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Un renforcement de la décentralisation avec plus de responsabilité des territoires notamment des élus, la société civile et le secteur privé local ;
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Une clarification des rôles et responsabilités de chaque acteur et une simplification des échelles de gouvernance territoriale.
L’acte III de la décentralisation en actions
L’acte 3 se traduit par des renforcements au plan financier des collectivités territoriales : ainsi, les fonds de dotation sont passés de 16 milliards FCFA en 2012 à 25 milliards FCFA en 2020, tandis que les fonds d’équipements ont évolué de 12,5 milliards FCFA en 2012 contre 30 milliards en 2020.
L’acte 3 de la décentralisation permet une territorialisation accrue des politiques publiques au niveau national, et une action collective renforcée des institutions pour le développement social et économique de notre pays.